L’aventure de ce Concours de Machine 2022 a commencé pour nous par une rencontre. Nous n’avions pas tout à fait prévu de prendre part à cette édition, à la vue de notre carnet de commande fourni en ce début d’année et du défi que constitue actuellement l’appro en composant d’un vélo complet. Mais ce n’était sans compter sur Caroline, notre pilote. 

 

Nous sommes en Mars. Le Concours nous fait de l’oeil, Andreas nous ayant mis l’eau à la bouche lors du CDM21 en nous esquissant le programme. Mais après avoir fait les deux dernières éditions, nous nous sentons presque gourmands de vouloir replonger. Et puis, entre un carnet de commande bien rempli et une période tendue pour l’approvisionnement de composants, on se dit que c’est déjà trop tard, que nous prendrons cette année un peu de distance avec cet évènement qui nous a laissé de beaux souvenirs mais aussi des frustrations. Et en même temps, c’est dur de ne pas en parler autour de nous. Le programme est excitant, historique, engagé. Alors de temps en temps, on laisse les mots filer, l’envie se sent quand même. 

 

Notre atelier se trouve dans un tiers lieu bien peuplé. Un petit monde, où tout se sait assez vite. Et dans ce petit monde se trouve Caro, notre future pilote, menuisière architecte de formation. Lorsqu’elle entend cette histoire de Concours pour la première fois, ça l’intrigue, elle se dit que ça pourrait intéresser des gens autour d’elle. Puis, plus elle y pense, plus elle se dit « pourquoi pas moi? »

 

Le courant passe très vite. Pour Caro, tout a commencé lorsqu’une amie lui a proposé de participer à son déménagement à vélo, de Strasbourg à Montpellier. Pas anodin, suffisant pour lancer sa pratique du bikepacking qui la séduit encore aujourd’hui, où elle a appri à rouler plus longtemps, plus vite, mais sait toujours s’arrêter pour contempler. Et la philosophie derrière notre approche artisanale, pas besoin de lui en parler très longtemps, elle la pratique tous les jours dans son domaine.

 

Alors fin mars, nous nous inscrivions au Concours, le coeur battant déjà fort parce qu’on savait que ça allait être sport. 3 mois plus tard, le CDM22 vient de se terminer, et nous sommes très heureux de vous présenter dans cet article le Manivelle N°43 x CDM un peu plus en détail. Bonne lecture!

 

Silvin et Thomas // Manivelle

LA CONCEPTION 

Le cahier des charges définit pour le Manivelle N°43 x CDM est hybride entre celui donné pour l’évènement et celui constitué avec Caroline par rapport à sa pratique de l’ultradistance, les deux CDC étant assez proches finalement. Il était aussi important pour nous de se challenger au niveau de la difficulté de la réalisation, notamment en partant pour une fourche truss avec potence intégrée, et en travaiilant en interne un maximum élements à acheminer le long du vélo (freins, vitesses, éclairage). La recherche de légèreté a clairement orienté la conception du vélo, ainsi que la volonté de donner vie à un vélo performant sur une grosse journée comme celle du CDM22, mais aussi sur les trips longs que Caroline envisage pour le futur. La filtration verticalle a également été travaillée, pour répondre au cahier des charges du Concours, et plus largement pour répondre aux besoins de Caroline, qui a régulièrement connue des douleurs sur sa pratique de longue distance. 

 

_Etude posturale et géométrie

Caroline roule depuis quelques années sur un Sobre Versatile. Au niveau de sa position, plusieurs élements étaient à améliorer : le reach et le stack à revoir (douleurs dorsales, engourdissement des mains, douleurs aux genous), un overlap à effacer. Pour ce qui est du comportement, elle souhaitait également un vélo plus nerveux, meilleur grimpeur, tout en gardant «l’inertie positive» sur le plat et la stabilité de son vélo actuel. 

La géométrie prend donc en charge tous ces élements. Le faible offset de la fourche est l’une des particularités de cette géométrie. Après avoir fait de longues sections de roulage avec le vélo du CDM21, un vtt avec un grand trail allégeant largement le travail de la ceinture abdominale à haute vitesse lorsque la trajectoire se trouve perturbée par un obstacle, nous avons souhaité donner à ce vélo un trail plus important que d’accoutumée sur nos vélos d’ultra-distance route, puisque celui-ci affrontera également des portions gravel, mais surtout du pavé! Moins de poids à mettre sur l’avant pour garder la trajectoire, moins d’engourdissement, moins de gainage. Et de l’énergie en plus pour reprendre de la vitesse en sortie de secteur!

_Fourche

 

Le coeur de ce projet. Le cahier de charges fait la belle part à la légèreté, et nous avons failli partir sur une fourche carbone. Mais quid de la filtration? Quel intérêt de présenter une fourche industrielle à un CDM?

Nous avons vite basculé sur l’idée d’une fourche Truss. Finalement, la fourche fera aussi potence, et rack avant. L’ensemble sortant tout juste en dessous du kilo. Un surpoid d’à peine 120gr par rapport à un combo potence alu, fourche carbone, rack inox (comparé à l’ensemble Columbus gravel, potence Ritchey comp, rack Nitto).

Les fourreaux inférieurs sont réalisés avec des seatstays de la gamme Zona, et les fourreaux remontant à la potence en 25cd4 épaisseur constante, de 12mm. Un faible diamètre laissant une flexion s’opérer, et apportant un amorti à la potence, elle aussi consitutée de 25cd4 D12mm. La fourche présente un passage interne du frein, mais aussi de l’éclairage, installé à l’avant du rack. Trois oeillets ont été installés sur les fourreaux intérieurs pour l’usage d’anything cages lorsque Caroline souhaitera partir plus chargée.

_Cadre

Le cadre est réalisé en Columbus Life, et en 25cd4 pour les seatstays. Un choix assez logique pour un cadre souhaité léger et filtrant. Les particularités du cadre : la jonction seatstays/tube de selle/tube supérieur, le passsage interne des vitesses et des freins, le standard flatmount arrière revisité, un évidement important de toutes les zones de jonction entre deux tubes, le serrage de selle. Comme sur tous nos cadres, les pattes sont maison.

_Passage interne

L’intégration en interne des gaines et autres câbles ne se limite pas à la fourche. Avec un passage dans le tube supérieur (avec tube interne D7mm) puis dans les seatstays pour le frein arrière et le dérailleur arrière, dans le tube diagonal et la base gauche pour l’éclairage. Initialement, nous souhaitions faire également passer le cablâge interne par la potence. Finalement, pour limiter les coudes rendant notamment le changement des vitesses moins fluide, l’intégration se fait à partir de la jonction entre la douille et le tube supérieur. Quand à l’éclairage, dont le cablage ressort de la fourche au niveau de la partie basse du pivot, il chemine ensuite dans le tube diagonal puis dans la base gauche pour venir alimenter la lampe arrière, installée sur un support sur mesure venant se fixer au niveau du frein arrière.

Note : Notre machine a obtenu le prix des plus beaux passages de câble.

 

_Bagagerie, en collaboration avec Copra Bikepacking

Deux sacs ont été conçu pour équiper Caroline lors du Concours de Machine : une sacoche avant, destinée à recevoir les différentes couches (chaude, étanche), les rechanges, la nourriture, la petite trousse de secours ; et une sacoche de cadre, pour tous les élements de réparation (crevaison, rayonnage, transmission). La sacoche avant est une réalisation hybride entre un modèle déjà réalisé par Timothée (Copra) et nos dessins. Nous souhaitions une sacoche facilement accessible en restant derrière le guidon, et qui tire partie de la géométrie de la fourche. Les volumes, couleurs, matériaux , sont des choix tous discutés avec notre pilote.

Pour la suite de la vie de ce vélo, le kit de bagagerie sera complété par un second framebag permettant de charger intégralement le triangle avant, et une sacoche arrière similaire à la sacoche avant, qui viendra s’installer sur un unirack. 

 _LA FABRICATION

La fabrication du Manivelle N°43 x CDM a duré environ 60 heures. Débuté mi-avril, nous souhaitions terminer le projet avant fin avril, pour pouvoir réaliser un premier montage brut et laisser du temps à Caroline pour s’entrainer sur le vélo. Un temps de réalisation très contraint donc, propre au Concours de Machine, et qui laisse place à une sacrée effervescence dans l’atelier, où les soirées deviennent plus longues. 

Nous avons commencé par la pièce la plus technique, la fourche. Elle a d’abord été travaillée comme deux élements à part entière. La potence, et la partie basse de la fourche, toutes deux pointées sur gabarit puis vérifiées sur marbre. Les fourreaux réalisant la jonction ces deux premiers élements ont ensuite été ajouté et pointé sur gabarit. Enfin, le rack a été ajouté à la structure, avant de réaliser l’ensemble des cordons.

La complexité de réalisation pour le cadre résidait dans le travail de passage interne au niveau du tube supérieur, et dans sa continuité avec les seatstays. L’intégralité des usinages a été réalisé avant de commencer à travailler sur le gabarit, alors qu’habituellement, nous travaillons d’abord le triangle avant, puis le triangle arrière, afin d’avancer en parallèle sur les opérations d’usinage et de soudure. L’objectif, s’assurer de la continuité entre tube supérieur et inférieur, mais aussi repérer toutes les zones de jonctions à évider.

Le support du frein arrière falt mount a été travailllé d’une manière similaire à un support avant, afin de ne pas venir gruger la base gauche pour ne pas affecter mécaniquement une zone particulièrement soumise aux contraintes.

_LE CDM22

Nous en revenons à peine. Après 4 jours intenses, à présenter notre réalisation, à prendre part au parcours particulièrement dur auquel notre pilote Caroline aura tenu tête avec brio, à partager notre travail durant tout le week-end, il y a beaucoup à raconter. Nous ferons cela dans un prochain article, mais ce qui est sûr, c’est que notre machine aura fait forte impression. Le prix du meilleur passage de câbles nous a été décerné, mais surtout, le public nous a placé très haut dans son classement, le jury nous a partagé son engouement pour notre production, et le plus important, Caro a pris beaucoup de plaisir sur son Manivelle N°43 ( à retrouver en détail ici )

À bientôt pour le récit de cette aventure bien particulière!